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La perte est un apprentissage

La perte est une constante avec laquelle nous composons dès le début de nos vies. De prime abord, ses déclinaisons pourraient englober la question de l’argent, qui va et vient, mais de tous il s’agit sans doute du signifiant le moins concerné par la perte. Indistinctement, un euro, un dollar, un denier quelconque en remplace un autre, donnant au Moi un sentiment de maîtrise symbolique mais surtout imaginaire. Raison pour laquelle une psychothérapie ne pourrait se dire psychanalytique si elle permet dans son déroulement le remboursement des séances par divers organismes. Comment l’être pourrait-il grandir si le clinicien qui le reçoit maintient l’illusion que la perte n’a pas lieu d’être à chaque fin de séance ? Comment l’être pourrait-il se détacher de ses symptômes, et par là de sa jouissance cachée dans les souffrances qui l’ont amené à consulter si la perte n’est même pas entendable pour la personne qui le reçoit ?

La perte est une constante, et son expérience est une épreuve plus ou moins douloureuse. Une ablation d’une partie du corps ou la perte d’un proche, une maison qui s’effondre ou la privation d’un héritage, une occasion manquée ou une seconde qui passe. La perte est une constante que la science tente de contrer, pensant la mort – la représentante universelle de la perte – comme une maladie guérissable. 

Et pourtant, la simple échographie du premier trimestre d’une grossesse donne la preuve que le fœtus vivra sous peu une perte radicale : celle d’un espace. Si nous l’observons bouger, cabrioler en tous sens, s’étirant à volonté, la donne change pour lui tout au long de sa gestation. En position fœtale, prêt à sortir, l’entrave s’est invitée, et ce jusqu’à l’air libre. La perte continuera pour lui : celle d’une chaleur permanente, d’une constante satiété de nourriture et d’air, d’une contenance imaginée bien souvent comme idyllique. 

La perte est une constante symbolique qu’il s’agit d’accepter comme telle, dont l’apprentissage fera du majeur un adulte dansant davantage avec le Réel. Il faut imaginer l’être humain heureux.